G20 à Hambourg – Pathétique.
Article de Reiner Braun (BIP) et Kristine Karch (No to war – no to NATO) suite au G 20 7-8 juillet 2017
(traduction : Alain Rouy)
Au lendemain du sommet et après un peu de repos, on peut se poser la question : qu’est-ce que ce sommet a apporté politiquement et à qui ?
Il s’agit ici de tenter une première approche de la réalité de ce sommet. Il ne faut pas simplement signaler le comportement agressif, profondément antidémocratique de la police, les protestations impressionnantes et courageuses, la manifestation exceptionnelle de 76000 participants, ainsi que les actions condamnables de groupes criminels. Combien de provocateurs parmi eux, nous arriverons sûrement à le savoir, une commission d’enquête indépendante est d’une urgente nécessité.
Quels sont les résultats de ce G 20 – sur le plan politique et sur le plan matériel ?
Le coût : il y a déjà longtemps que le coût officiel de 130 millions d’euros ne correspond plus à la réalité. Le chiffre de 300 millions d’euros est davantage conforme aux dépenses engagées et de nombreux coûts comme les pertes des petites entreprises ou des salariés n’ayant pas pu aller au travail, le chaos dans les transports, le déficit touristique ne peuvent pas être évalués.
Est-ce que ces immenses dépenses ont apporté un « bénéfice politique » ?
Un aperçu de la déclaration finale illustre la vacuité de ce sommet :
Tout ce qu’il n’y a pas :
- Pas un centime pour le fonds mondial pour le climat de l’ONU qui n’est même pas mentionné.
- Aucun nouveau soutien financier et politique pour les Objectifs du Développement Durable (ODD) de l’ONU. Ils sont évoqués à des fins de propagande mais aucune mesure n’a été décidée pour leur réalisation. Les victimes de la famine, les pauvres continueront d’attendre un soutien actif ! De cette façon, l’Afrique n’aura jamais l’opportunité de se développer elle-même.
- Pas la moindre initiative pour la réalisation de l’Accord de Paris. Comment les objectifs de l’Accord de Paris de 2015 peuvent-ils devenir réalité, comment réduire les émissions, comment aider les plus pauvres parmi les pauvres dans la lutte contre le changement climatique ? Il n’y a rien, absolument rien dans la déclaration finale. L’Allemagne ne ferme pas ses centrales à charbon et n’atteindra avec la politique de ce gouvernement aucun des objectifs climatiques
- Le désarmement n’apparaît pas. Comment atteindre les ODD et les objectifs climatiques si ce n’est en réduisant les 1,7 milliards $ US dépensés pour l’armement ?
- Pas un mot sur la prévention des crises et le traitement non militaire des conflits – la guerre et les crises continueront de coûter chaque jour des milliers de vies humaines, de l’Afghanistan à la Syrie.
Ce que contient la déclaration finale:
- Une profession de foi néolibérale en faveur de la politique économique et commerciale qui a échoué. Qu’il s’agisse du commerce mondial néolibéral ou du commerce national protectionniste, tous deux se pratiquent sur le dos des pays les plus pauvres, tous deux sont à l’opposé d’un commerce équitable et juste. On glorifie et perpétue cette politique commerciale fondée sur l’exploitation qui a échoué – faisant fi de son échec. On perpétue un commerce et un système économique injustes.
- En particulier, le gouvernement allemand poursuit dans un cadre multilatéral une stratégie agressive d’exportations excédentaires qui conduit à d’immenses inégalités de développement, à l’instabilité économique et à des crises et conflits politiques dans les pays concernés d’Europe et dans d’autres parties du monde.
- Davantage d’énergies fossiles pendant des années, particulièrement aux Etats-Unis mais aussi dans de nombreux autres pays du G 20. L’Allemagne prend une part active à l’exploitation des matières fossiles. La fin si urgente de l’ère fossile est repoussée à plus tard : la planète est menacée dans son existence, de plus en plus nous subirons quotidiennement les effets sur le climat et ce sont de nouveau les plus pauvres parmi les pauvres qui sont les plus touchés – on ne peut guère imaginer plus inéquitable et plus exploiteur.
- Le déni et le mensonge concernant les migrants et les immigrés sont établis. Tenez-les à l’écart de la forteresse Europe, coûte que coûte. Avec son mur, Trump peut sans difficulté apporter sa contribution. Les droits de l’homme sont réservés aux discours du dimanche.
- Ce qui ne doit absolument pas manquer : la foi renouvelée dans la « croissance » comme si une croissance sans limites ne contribuait pas aux crises et aux catastrophes, comme si les grands de ce monde ignoraient encore cette simple vérité qu’une croissance sans limites est impossible sur une planète limitée.
- L’émancipation de la femme se réduit à l’accès d’une minorité de femmes aux fonctions de grandes capitalistes répugnantes à la Ivanka Trump. L’émancipation par l’exploitation – non merci !
- « Du vieux vin dans des outres neuves », ainsi peut-on résumer les résultats de la déclaration finale du sommet affiché pompeusement comme un G 20 pour l’Afrique. Politique commerciale néolibérale, ouverture des marchés, réduction des droits de douane signifient un pillage encore plus vaste des ressources et des pays : toujours la même histoire responsable de la situation désastreuse de nombreux pays de ce continent. On fait la cour aux dictateurs. L’aide solidaire permettant l’autonomie et le développement a un tout autre visage.
Pour ce résultat qu’on ne peut même pas qualifier de nul, mais bien de coup porté contre l’Accord de Paris, on aura
- suspendu la démocratie
- détruit l’environnement par les centaines de milliers de km parcourus par les avions
- gaspillé des sommes d’argent insensées
- continué d’affaiblir le système des Nations-Unies.
C’est une politique irresponsable, et pour quoi ? pour le profit d’un petit nombre de grandes entreprises et de banques, de quelques acteurs de la mondialisation. Les dizaines de milliers de personnes qui ont manifesté dans les rues avec courage et détermination sont un signe d’espoir – il faudra encore être bien plus nombreux pour mettre fin à cette folie dangereuse pour l’écologie, la démocratie et l’humanité.
P.S. Si un cessez-le-feu devait véritablement intervenir dans le sud-ouest syrien, tant mieux. Mais ces deux messieurs auraient pu avoir se rencontrer plus intensément, plus simplement et à moindre coût en Alaska (et il y avait des semaines que ce plan était négocié secrètement en Jordanie).
Reiner Braun, Co-Président du Bureau International de la Paix (BIP/IPB)
Kristine Karch, Co-Présidente du réseau international « No to War – no to NATO »